L’Europe peut opter pour une initiative historique en soutenant un changement démocratique en Iran
« Aujourd’hui, le monde a besoin d’une initiative courageuse vis-à-vis de l’Iran, car les solutions classiques comme la politique de complaisance et l’intervention militaire étrangère sont dans une impasse. Le changement démocratique par le peuple iranien et sa résistance est la solution la moins coûteuse. L’Europe peut opter pour une initiative et une responsabilité historique en soutenant un changement démocratique en Iran pour débloquer la situation », a déclaré Maryam Radjavi le 24 avril à Strasbourg.
La présidente de la République élue de la Résistance iranienne a défendu le changement démocratique en Iran lors d’un colloque sur « les relations de l’Union européenne avec l’Iran : perspectives d’un changement démocratique », organisé par le Comité français pour un Iran démocratique et l’intergroupe des Amis d’un Iran libre au Parlement européen.
Le colloque était présidé par Adrien Zeller, président du Conseil régional d’Alsace, et Alejo Vidal Quadras, vice-président du Parlement européen. De nombreux députés européens et nationaux de tous bords et de divers pays, des juristes de premier plan comme Lord Slynn of Hadley, ancien juge à la Cour européenne de Justice, et d’anciens ministres comme Sid Ahmed Ghozali ex-Premier ministre algérien, ou Alain Vivien, ancien secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes, ont pris la parole. Tous ont souligné la nécessité de soutenir la Résistance iranienne, et en premier lieu de retirer les Moudjahidine du peuple d’Iran de la liste du terrorisme.
Je souhaiterai d’abord remercier M. Adrien Zeller, M. Alejo Vidal-Quadras, le Comité français pour un Iran démocratique et le Comité des Amis d’un Iran libre au Parlement européen pour cette invitation.
Permettez-moi en premier lieu de rendre hommage aux défenseurs des droits de l’homme exécutés ou assassinés par le fascisme religieux en Iran.
Je souhaite aussi rendre hommage à Aimé Césaire, ce phare de la littérature et de la défense des droits de l’homme dont je lisais les poèmes dans ma jeunesse en Iran. Il était un ami de la Résistance et un soutien de la liberté et de la démocratie en Iran.
Ce 24 avril, est également l’anniversaire de l’assassinat du professeur Kazem Radjavi, le premier ambassadeur d’Iran au siège européen des Nations Unies après la révolution de 1979. Pour mes compatriotes, il est le symbole de la défense des droits de l’homme. Les agents des mollahs l’ont assassiné à Genève en 1990 tout près de la commission des droits de l’homme.
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureuse de me retrouver avec vous pour parler de la situation en Iran. Aujourd’hui, les crises au Moyen-Orient sont les défis les plus importants pour la communauté internationale. Les troubles et l’insécurité en Irak et en Afghanistan, la crise au Liban et dans les territoires palestiniens, et le sabotage du processus de paix au Proche-Orient, sont provoqués par le régime des mollahs qui est l’épicentre de l’intégrisme islamiste.
Je vais essayer d’aborder ce thème en quatre points :
– Premièrement, la politique des mollahs s’est engagée sur une voie extrémiste sans retour.
– Deuxièmement, la politique pour un changement d’attitude du régime des mollahs a échoué.
– Troisièmement, la clé de cette crise se trouve entre les mains de la Résistance iranienne.
– Et quatrièmement, cette situation exige une initiative européenne orientée par la France surtout durant sa présidence de l’Union Européenne.
Un régime plus extrémiste
Notre réunion d’aujourd’hui coïncide avec un tournant dans la politique du régime iranien, c’est-à-dire les élections législatives des mollahs dont le deuxième tour aura lieu demain. Dans une dictature religieuse, des élections et un parlement ne sont qu’une caricature. Sous le régime des mollahs, « réformateur » et « conservateur » n’ont pas de sens non plus, parce que toutes les factions doivent faire allégeance au guide suprême. Le régime du guide suprême qui donne la priorité absolue aux mollahs est un régime médiéval. Pour rester au pouvoir, il s’appuie sur la répression, l’exportation du terrorisme et le fascisme religieux à l’étranger.
Selon les articles 5 et 11 de la constitution des mollahs, le guide suprême doit diriger tous les musulmans du monde et « la république islamique doit s’efforcer de réaliser l’unité politique, économique et culturelle du monde musulman ». L’article 110 stipule que le pouvoir absolu appartient au guide du régime. C’est lui qui détermine la politique du régime. Il est le commandant en chef des forces armées. Il nomme les commandants de l’armée, de la police et des gardiens de la révolution. Il nomme les plus hauts responsables judiciaires et le directeur de la radiotélévision du pays et désigne les mollahs membres du conseil des gardiens.
Lors des dernières élections, le réseau de l’OMPI à l’intérieur du pays a surveillé 25.000 bureaux de vote sur les 45.000. Ce contrôle a démontré qu’environ 95% des électeurs n’ont pas voté. Même les chiffres officiels démontrent l’étendue du boycott. Selon ces chiffres, les candidats ont pu entrer au parlement avec seulement 5 à 12% des voix.
Dans cette élection, Khamenei a éliminé sans pitié ses rivaux en formant un Majlis sur mesure dont beaucoup de députés sont d’anciens tortionnaires et terroristes. En 2005, en plaçant Ahmadinejad à la présidence, il a commencé à purger son régime. Cette année avec ces élections, il achève l’élimination des autres factions.
Le 9 avril dans son discours, Ahmadinejad a annoncé une grande opération chirurgicale au sein du régime. Le lendemain, il a assuré qu’il ne connaîtrait pas de répit « tant que la direction corrompue du monde ne disparaîtra pas totalement ». Le 16 avril, dans une autre intervention, il a annoncé qu’il avait deux missions : l’une, construire l’Iran, l’autre changer les régimes qui gouvernent le monde. C’est dans ce sens qu’il a évoqué davantage de purges dans les factions internes, de « couper des mains » et de les « déraciner ».
Cette situation est un tournant sans précédent dans les trente années du régime des mollahs. Cependant le but de Khamenei n’était pas seulement de supprimer les factions soi-disant réformatrices. Le but est de préparer la voie pour obtenir la bombe atomique. Le but est d’unifier le front du guide suprême pour affronter les défis intérieurs et internationaux dans sa course à l’arme nucléaire. Après ces élections, Ahmadinejad a déclaré que ce parlement allait exploiter toutes les capacités du programme nucléaire.
Je suis heureuse que l’Union Européenne ait déclaré que les élections du Majlis des mollahs n’ont été ni libres ni équitables. L’Union Européenne a déclaré que « le peuple iranien mérite des élections libres et démocratiques » et c’est pour des élections libres et démocratiques que l’OMPI et la Résistance iranienne luttent depuis le premier jour. Il faut donc demander à l’Union Européenne pourquoi elle a collé une étiquette de terroriste à la lutte pour des élections libres et la démocratie?
Davantage de terrorisme dans la région
Cette orientation extrémiste du régime se manifeste par davantage d’exportation du terrorisme et d’instabilité au Moyen-Orient. Je pense que vous connaissez l’ampleur de l’ingérence terroriste des mollahs en Irak. Pendant des années, les commandants et les Hautes autorités des Etats-Unis ont préféré sous-estimer cette menace. Mais aujourd’hui, ils déclarent que le régime iranien est une menace stratégique pour l’Irak.
Au Liban, le régime a développé l’arsenal de missiles du Hezbollah. Après la guerre au Liban en 2006, les mollahs ont donné au Hezbollah libanais quatorze milliards de dollars, alors que 80% de la population en Iran vivent sous le seuil de pauvreté. Les partis libanais disent que lorsque les obstacles politiques seront retirés, le Hezbollah n’aura pas besoin de quelques semaines pour prendre le contrôle du pays, mais simplement de quelques jours.
Tout démontre qu’ils ont choisi une politique plus extrême.
Changer l’attitude des mollahs : un mirage
L’autre sujet que je voudrais aborder, concerne ceux qui voulaient changer l’attitude des mollahs, et qui ont échoué. Le changement d’attitude n’est qu’un mirage. C’est le message de la dernière élection du Majlis des mollahs. Ils ont ignoré le paquet de mesures incitatives du groupe des 5+1. Un paquet qui a été annoncé en juin 2006. Ces mesures ont été soulignées dans quatre résolutions du Conseil de Sécurité. Or, les mollahs ont fait tout le contraire.
Pendant quatre ans et demi, la Troïka européenne a négocié avec les mollahs sur le programme nucléaire. Cela a uniquement permis aux mollahs de gagner du temps et de compléter leur projet d’armement nucléaire.
La plus grande erreur de l’occident
Ces négociations ont été une erreur importante de l’occident vis-à-vis du régime iranien, mais pas la plus grave. Car la plus grave erreur, c’est la répression de la Résistance et de sa force principale, les Moudjahidine du peuple, au profit des mollahs. L’occident a mis cette organisation qui lutte pour la démocratie et des élections libres dans sa liste terroriste pour la bloquer.
De même les Américains qui ont bombardé les bases de l’OMPI en Irak en avril 2003, ont commis cette erreur majeure à la demande des mollahs en leur donnant la meilleure occasion de dominer l’Irak. Dans leur déclaration, 5,2 millions d’Irakiens ont affirmé en juin 2006 que le bombardement et le désarmement en Irak des Moudjahidine du peuple d’Iran à la Cité d’Achraf, le bastion de la résistance iranienne, ont créé un déséquilibre stratégique au Moyen-Orient en faveur des mollahs.
Cependant par la suite, sept services de renseignement américains ont interrogé à plusieurs reprises seize mois durant les membres des Moudjahidine du peuple. Ils ont conclu, selon les termes des autorités américaines, qu’il n’existe aucune base pour accuser de terrorisme ne serait-ce qu’un seul membre de l’OMPI. (New York Times, 27 juillet 2004). En 2004, la Force multinationale en Irak a reconnu aux Moudjahidine du peuple le statut de « personnes protégées » en vertu de la IVe convention de Genève.
La même erreur s’est répétée en juin 2003 sous une autre version en France avec une vaste opération de police contre notre mouvement sous prétexte du terrorisme. A cette époque, les autorités ont ouvertement annoncé que le but était de démanteler la Résistance iranienne. L’opinion publique française a été bouleversée par cet événement et les médias ont largement annoncé un marchandage entre le gouvernement de Jacques Chirac et les mollahs.
Avec cette grande erreur, l’occident a privé non seulement le peuple iranien mais aussi le monde d’un changement démocratique en Iran et de se débarrasser de l’intégrisme agressif au pouvoir.
L’inscription des Moudjahidine du peuple sur la liste du terrorisme s’est faite à l’origine sans la moindre base factuelle, ni légale. En Europe, c’est la Grande-Bretagne qui a demandé la première cette inscription. Par la suite, de hauts responsables britanniques ont déclaré que l’inscription avait été faite à la demande des mollahs.
La justice européenne contre l’étiquette du terrorisme
En décembre 2006, la Cour de justice européenne à Luxembourg a annulé la décision du conseil des ministres concernant le cas des Moudjahidine du peuple. Le 30 novembre 2007, la justice britannique a estimé que la décision du ministre anglais de l’Intérieur de maintenir le nom de l’OMPI dans la liste noire était perverse. L’Assemblée parlementaire du conseil de l’Europe et le Parlement européen ont demandé dans des résolutions l’application de ces décisions. Malheureusement jusqu’à présent, le conseil des ministres a préféré désobéir à ces verdicts. L’Assemblée parlementaire du conseil de l’Europe a déclaré que « le conseil des ministres de l’Union Européenne a violé l’état de droit ».
La clé de la crise
Permettez-moi d’aborder le troisième point. Quelle est la solution à la crise iranienne? D’une part, personne ne souhaite la répétition en Iran d’un scénario comme en Irak. D’autre part, les tentatives pour un changement d’attitude des mollahs ont échoué.
C’est pourquoi, la solution efficace, est un changement démocratique par le peuple iranien et sa résistance. Le CNRI et l’OMPI sont la seule force organisée capable de mobiliser un immense potentiel en Iran contre ce régime. Les élections récentes témoignent que la société iranienne est en plein bouleversement et que le peuple aspire au changement. Malgré une répression croissante en 2007, on a enregistré plus de 5000 mouvements de protestation des diverses couches sociales en Iran.
La force axiale du CNRI, les Moudjahidine du peuple, croit dans un islam démocratique et tolérant. Ce mouvement bénéficie d’une vaste base populaire. Cela fait trente ans qu’il affronte le régime des mollahs, c’est-à-dire le cœur de l’intégrisme islamiste. C’est pourquoi il est la seule antithèse de ce phénomène néfaste. Pendant des années, ce mouvement a été la seule source de révélations du programme nucléaire et des activités terroristes du régime de Téhéran en Irak, dans la région et dans le monde.
5,2 millions d’Irakiens en juin 2006 et 300.000 chiites du sud de l’Irak en novembre 2007 ont déclaré qu’il fallait soutenir les Moudjahidine du peuple en Irak pour freiner l’ingérence des mollahs dans ce pays.
La Résistance veut établir une démocratie parlementaire et laïque en Iran. Le CNRI est un parlement en exil de 530 membres de toutes les tendances politiques. L’égalité entre les femmes et les hommes et toutes les minorités religieuses et ethniques, l’abolition de la peine de mort, le libre marché et la coexistence pacifique avec tous les pays du monde figurent au programme de la résistance.
Le rôle particulier de la France
Aujourd’hui, le monde a besoin d’une initiative courageuse vis-à-vis de l’Iran, car les solutions classiques comme la politique de complaisance et l’intervention militaire étrangère sont dans une impasse. Le changement démocratique par le peuple iranien et sa résistance est la solution la moins coûteuse.
L’Europe peut opter pour une initiative et une responsabilité historique en soutenant un changement démocratique en Iran pour débloquer la situation. Dans deux mois, la France prendra la présidence de l’Union européenne. Contrairement au passé, la France a adopté une politique de fermeté avec le régime des mollahs. Cette fermeté ne peut être prise au sérieux qu’en reconnaissant la Résistance du peuple iranien. L’étape la plus importante est le retrait des Moudjahidine du peuple de la liste des groupes terroristes de l’Union Européenne. Ce serait respecter l’état de droit dont la France est un pays fondateur.
Il y a 27 ans que le bureau du Conseil national de la Résistance iranienne, l’alternative démocratique du régime des mollahs, est installé en France. Je rappelle que le CNRI n’est pas inscrit sur la liste du terrorisme. C’est une occasion pour la France de trouver une solution européenne à la crise iranienne. Enfin, la reconnaissance du CNRI sera une stratégie efficace contre la soif d’hégémonie des mollahs. Ils veulent faire du Liban, un Irak pour la France.
La seule option pour les en empêcher, c’est que la France soit du côté du peuple iranien. C’est la plus grande pression contre les mollahs. Ce régime touche à sa fin. Les relations politiques et économiques de la France et de l’Europe avec l’Iran ne peuvent être garanties que si elles accompagnent le peuple iranien dans sa quête de la liberté.
C’est pourquoi, aujourd’hui j’appelle les pays européens à ouvrir un nouveau chapitre dans les relations avec l’Iran, en reconnaissant le CNRI. Le chapitre de l’amitié avec le peuple iranien et sa résistance, pour les droits de l’homme, la liberté, la paix et la sécurité dans le monde.
Une fois de plus je vous remercie à tous.
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