Interview de Maryam Radjavi avec la chaine télévisée d’Al-Arabiya
La chaine télévisée Al-Arabiya a diffusé une interview de Maryam Radjavi le 29 aout 2020 dans l’émission « Al-Baad Al-Akhr ».
Évoquant le rôle du régime clérical dans l’assassinat de dizaines de personnalités de l’opposition iranienne en Europe, Mme Radjavi a évoqué le plus grand scandale politique de ce régime : la tentative d’attentat terroriste contre le grand rassemblement de la résistance à Villepinte, Paris en juillet 2018.
Al Arabiya – Le 29 aout 2020
Au cours des 40 dernières années, le régime clérical a été impliqué dans l’assassinat de dizaines de personnalités de l’opposition dans les villes et capitales européennes. Le plus grand scandale politique a eu lieu il y a deux ans, lorsqu’un diplomate iranien en poste à l’ambassade d’Iran en Autriche a été impliqué dans un acte terroriste majeur. Il transportait des explosifs dans sa valise diplomatique. Il avait fomenté un attentat à la bombe contre un rassemblement de l’opposition iranienne.
Ce diplomate s’appelle Assadollah Asadi, et son procès a commencé en Belgique le mois dernier. La dirigeante de l’opposition iranienne Maryam Radjavi a témoigné dans l’affaire et déclaré aux juges d’instruction que cet acte terroriste majeur a été approuvé lors d’une réunion du Conseil suprême de sécurité du régime présidée par Hassan Rohani et sur ordre direct d’Ali Khamenei, le guide suprême du régime.
La dirigeante de l’opposition iranienne Maryam Radjavi a joué un rôle clé dans la dénonciation des violations des droits humains et des crimes terroristes du régime iranien. Elle est en guerre contre lui depuis 40 ans et a fait de nombreux sacrifices. Plusieurs membres de sa famille et plusieurs de ses camarades ont été assassinés par le régime iranien. Nous accueillons dans notre émission notre invitée de Paris, Mme Maryam Radjavi.
Question 1 : Permettez-moi de commencer par les grandes opérations prévoyant de mener des attaques terroristes approuvées par le président et le guide suprême en Iran. Quand ces complots ont-ils été conçus ?
Réponse : je vous remercie de l’occasion que vous me donnez de m’adresser à vos téléspectateurs. En guise d’introduction, je dois dire que le régime des mollahs est incapable de se maintenir au pouvoir un seul jour sans tuer des opposants ou mener des attentats terroristes contre eux. J’ai amené un livre contenant une liste de martyrs des Moudjahidine du peuple (OMPI/MEK) et de la Résistance iranienne. 120 000 ont été exécutés à ce jour pour des raisons politiques. Ce livre contient notamment les noms de 20 000 d’entre eux et il est accessible au public. Au cours de l’été 1988, 30 000 prisonniers politiques ont été exécutées sur la base d’une fatwa de Khomeiny en personne. Regardez cette longue liste, qui fait référence aux prisonniers politiques exécutés au cours de l’été 1988 sur ordre de Khomeiny. Une copie de l’ordre de Khomeiny figure également dans ce livre. Toutes les victimes ont été exécutées conformément à cet ordre.
Il s’agissait des meilleurs enfants du peuple iranien, issus de toutes les catégories de la société iranienne. La fatwa de Khomeiny, qui dicte aussi la conduite de Khamenei [son successeur], ne laisse aucun doute sur ce crime contre l’humanité. Selon ce décret, toute personne considérée comme fidèle à l’organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI/MEK) doit être exécutée. Pourquoi ? Parce que l’OMPI est l’antithèse de la dictature religieuse. Le régime du Guide suprême est par son essence la version chiite de Daech qui a émergé ces derniers temps dans le monde musulman, 40 ans après [l’instauration du régime clérical en Iran]. Vous savez que la dictature religieuse a étendu la répression de ses opposants hors d’Iran par le biais du terrorisme. Il a assassiné des dizaines de dissidents en Europe.
La semaine dernière, le Département d’Etat américain a mis en place des restrictions visant la direction de la prison d’Evine ainsi que sur 13 agents du régime impliqués dans l’assassinat du représentant du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI) à Genève, le Dr Kazem Radjavi.
Voici une photo du Dr Kazem qui est le grand martyr des droits de l’homme en Iran.
C’est sous le couvert de « diplomates » que ces agents ont commis ce crime. Le représentant du CNRI en Italie, Mohammad-Hossein Naqdi, a également été assassiné par les diplomates-terroristes du régime. Voici une photo de M. Naqdi.
Zahra Rajabi, membre du conseil de direction de l’OMPI, a été assassinée en Turquie. En outre, de nombreux autres dissidents ont été tués par le régime à l’étranger.
Vous savez peut-être que deux grands complots terroristes contre notre résistance ont été déjoués en 2018. Le premier visait la célébration du nouvel an iranien par l’OMPI en Albanie en mars 2018. Le second attentat terroriste visait le grand rassemblement de la Résistance iranienne près de Paris en juin de la même année.
J’étais présente à cet événement avec des personnalités américaines, européennes et arabes de premier plan, notamment l’ancien premier ministre algérien Sid Ahmed Ghozali, le maire Rudy Giuliani, l’ancien premier ministre canadien Stephen Harper, ainsi que d’anciens ministres de France, d’Italie, du Canada et de nombreuses autres personnalités.
Un diplomate du régime qui est également un haut responsable des services de renseignement, a passé ces deux dernières années en prison en Belgique. Il est directement impliqué dans le complot de l’attentat près de Paris. C’est la première fois qu’un diplomate en exercice est arrêté et emprisonné pour mener un complot terroriste.
Son procès débutera le 27 novembre 2020. Cet individu a personnellement apporté des explosifs en Europe dans un avion de ligne et les a remis en main propre à deux agents terroristes.
Nous avons des informations selon lesquelles le régime clérical aurait même menacé la Belgique de terrorisme pour empêcher la poursuite de l’enquête. Mais il a échoué, et la procédure judiciaire a été menée, l’audience publique du tribunal étant prévue pour le 27 novembre.
Ce crime terroriste a été approuvé par le Conseil suprême de sécurité nationale du régime, présidé par le président des mollahs Hassan Rohani, et a été avalisé par le guide suprême des mollahs, Ali Khamenei.
Question : Avez-vous témoigné lors des audiences de cette affaire ?
Réponse : Oui.
Question : Vous y avez témoigné devant les autorités judiciaires ?
Réponse : Oui.
Question: J’ai une question à ce sujet.
Réponse : Je vous en prie.
Question : Qu’avez-vous dit lors de votre témoignage ? Et comment avez-vous témoigné à propos de ce procès, qui va déclencher une crise internationale de taille ?
Réponse : Dans mon témoignage de sept heures, j’ai clairement indiqué que ce complot terroriste avait été explicitement planifié au Conseil suprême de sécurité nationale du régime, présidé par Rohani, et qu’il avait ensuite été approuvé et signé par Khamenei. Le plan a ensuite été mis en œuvre et, pour la première fois, un diplomate officiel du régime est entré dans la phase de la mise en oeuvre. Bien entendu, les rôles du ministre du Renseignement et de Zarif le ministre des Affaires étrangères du régime ont été très importants et critiques. C’est ce que j’ai dit là-bas. Par conséquent, non seulement les exécutants de ce complot criminel mais aussi ceux qui l’ont ordonné doivent être jugés. Et, puisque ce régime est en position de …
Question : Certains disent que les pays européens font preuve de naïveté à cet égard afin d’éviter de pointer du doigt le régime. Ce qui lui permet de mener des plans et des complots supplémentaires pour assassiner des opposants. Et il peut même confier ces plans à d’autres diplomates.
Réponse : Malheureusement, je dois dire que c’est le cas, et regrettablement certains pays européens ont cherché pendant des années à conclure des accords commerciaux avec le régime. En se fondant notamment sur l’illusion incroyablement néfaste qu’il existerait des éléments modérés au sein de régime, ils ont mis en avant la politique de complaisance. Par conséquent, je pense que ce sont les mêmes personnes qui soutiennent Khamenei, Rohani, Alavi (le ministre du Renseignements) et Zarif. Cette politique de complaisance sauve les individus impliqués dans ce sale complot, et nous devons nous y opposer.
Je tiens à souligner ici que la politique de complaisance a encouragé les mollahs. Et, malheureusement, les partisans de cette politique n’ont pas compris que, premièrement, la nature et l’essence de ce régime ne lui permettent pas de se réformer ; deuxièmement, les mollahs ont besoin de la répression à l’intérieur de l’Iran et d’engendrer des crises à l’étranger pour survivre. Bien sûr, aujourd’hui, la réalité est devenue plus claire et le rapport de force a changé. Le monde est témoin d’un régime chancelant qui n’a pas d’avenir.
Question: L’administration Trump fait pression sur le régime iranien. Elle dit vouloir changer le comportement du régime. Votre position est que le régime ne changera pas de comportement. Le régime espère-t-il la défaite de Trump aux élections présidentielles ? Si cela se produit, comment la nouvelle administration se comportera-t-elle ?
Réponse : Nous avons toujours dit que le changement en Iran se fera par le peuple iranien, sa Résistance et l’OMPI. Nous soutenons une politique de fermeté de la communauté internationale, y compris des Etats-Unis et de l’Europe, contre le régime des mollahs, car dans le passé, la politique de complaisance a permis la survie du régime. Cette politique est totalement contraire aux intérêts nationaux du peuple iranien et va à l’encontre de la stabilité et de la sécurité régionales et de la paix mondiale. La réimposition des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU contre le régime iranien est une mesure impérative pour empêcher ce régime de se doter d’armes nucléaires. Au lendemain de l’accord nucléaire du 25 juillet, j’avais déclaré que la suspension des résolutions ne pouvait pas empêcher le régime de se doter d’une arme nucléaire. J’avais ajouté que l’argent que le régime obtiendra grâce à cet accord sera entièrement utilisé pour réprimer le peuple iranien et exporter le bellicisme dans la région, y compris en Irak, en Syrie et au Yémen. Par conséquent, j’ai déclaré à plusieurs reprises que, quelle que soit la personne aux commandes aux États-Unis, ce régime tombera inévitablement. C’est la demande du peuple iranien. Et en réalité, l’avenir sera déterminé par le peuple iranien, la Résistance iranienne et les unités de résistance. Donc, ce que l’on attend de la communauté internationale, c’est une politique de fermeté qui la placera aux côtés du peuple iranien et de sa Résistance pour le bien de l’avenir de la région et du peuple iranien. Ce que nous disons, c’est que le régime ne peut pas résoudre les crises qui l’assaillent et qu’il faut donc réimposer les résolutions du CSNU, mettre fin à l’enrichissement de l’uranium dans son intégralité et fermer complètement les sites nucléaires du régime. C’est ce qui garantira les intérêts du peuple iranien et c’est un impératif pour la paix et la sécurité dans toute la région.
Question : En ce qui concerne la nation iranienne, tous les opposants sont en exil, et le régime réprime toute action à l’intérieur de l’Iran. Alors, y a-t-il un espoir de changement à l’intérieur de l’Iran ?
Réponse : Il est vrai qu’il y a une répression et une pression maximale de la part du régime, y compris de nombreuses arrestations, tortures et exécutions. Mais la réalité est que l’Iran est dans un état explosif. Le peuple iranien ne veut pas de ce régime. Le régime des mollahs est dans une impasse et il n’a aucune issue. La majorité de la population est frustrée par le statu quo. Les soulèvements de décembre 2017 et de novembre 2019 ont démontré le mécontentement du peuple iranien et son désir de changement de régime. Lors des manifestations de novembre 2019, les gens scandait « A bas Khamenei, à bas Rohani » et « réformateurs, conservateurs, la partie est terminée ». Cela signifie qu’ils exigent que le régime soit renversé dans son intégralité. Ils scandaient également « A bas l’oppresseur, qu’il soit chah ou mollah ». Ils rejettent aussi bien la dictature du chah que la théocratie actuelle. Le peuple iranien est tourné vers l’avenir. Lors du soulèvement de novembre, le régime a pu échapper temporairement (à son destin inévitable) en massacrant sans pitié au moins 1 500 personnes. Mais il sera finalement renversé par le peuple iranien et sa Résistance. Il n’y a absolument aucun doute à ce sujet.
J’ai ici un certain nombre de photos de martyrs du soulèvement de novembre 2019. Il y a de très jeunes adolescents. Et ces photos montrent l’immensité et l’ampleur du soulèvement à travers l’Iran – tous ces points rouges indiquent les endroits où des manifestations ont eu lieu. La réalité est que la situation de la société iranienne est explosive. Ainsi, il faut dire qu’il existe une importante force insurgée et persévérante ainsi que des unités de résistance à l’intérieur de l’Iran. Le peuple iranien sait très bien que le régime est responsable de la propagation débridée du coronavirus en Iran. À ce jour, près de 100 000 de mes compatriotes ont malheureusement perdu la vie à cause de ce virus. Le régime ne publie qu’un cinquième des chiffres réels, ce qui est trompeur. La corruption financière est endémique au sein du régime et les structures économiques sont en ruine. Les mollahs n’ont donc pas d’issue de secours. En même temps, le régime est encore plus effrayé par la popularité croissante de l’OMPI et du Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI) dans le pays.
Question : Pourriez-vous nous en dire plus sur la question de la corruption financière ? Le peuple iranien connaît des conditions financières et de vie difficiles. Et le peuple proteste contre la situation économique. Mais il y a un problème plus important. Alors, pourquoi le régime dépense-t-il son argent pour s’ingérer ouvertement dans les pays arabes de la région, causant ainsi des dommages supplémentaires à l’économie ? Et ce, malgré toutes les pressions que les États-Unis exercent sur lui pour l’empêcher de s’ingérer dans les pays arabes de la région.
Réponse : C’est une bonne question. L’Iran est un pays riche, doté de vastes ressources naturelles, dont le pétrole et le gaz. Cependant, malgré ses richesses, la population vit dans la pauvreté et la faim. Pourquoi ? Parce que depuis le premier jour, la stratégie de survie du régime a été d’exporter le terrorisme, l’extrémisme et le bellicisme, tout en s’ingérant dans les pays de la région. Tant que ce régime sera au pouvoir, il poursuivra cette politique. Il dépensera son argent à ces fins. C’est un régime qui parle ouvertement de son désir d’établir une union (de type soviétique) de républiques islamiques. Le mandat officiel de la Force Qods, qui fait partie des forces armées du régime, est de s’ingérer dans les pays étrangers. Ce régime a poursuivi une guerre sanglante de huit ans avec l’Irak au cri de « libérer Jérusalem via Karbala » [en Irak]. Ce régime est responsable de la mort de plus de 500 000 personnes en Syrie. Il a causé des ravages et des effusions de sang en Irak. Et il est l’élément principal de la guerre au Yémen et empêche la paix dans ce pays. Il attaque les navires et les infrastructures pétrolières comme celles de l’Aramco. Le peuple iranien s’oppose fermement à ces politiques. Le peuple iranien et sa Résistance recherchent une relation fraternelle avec les pays de la région. Et je dois dire que fermer les yeux sur les ingérences de ce régime et lui faire des concessions n’empêcheront pas son ingérence dans la région et constituent une erreur catastrophique.
Au contraire, une telle action ne fait qu’encourager davantage les mollahs. Tant que ce régime existera, la région ne connaîtra pas la tranquillité. L’ingérence dans les affaires des autres pays fait partie de la stratégie de survie de ce régime. Bien sûr, je souligne une fois de plus que la solution ultime pour l’Iran, la paix et la stabilité se trouve dans le renversement des mollahs par le peuple iranien et sa Résistance. Il ne fait aucun doute que l’Iran de demain sera libéré de la tyrannie, qu’elle soit du chah ou des mollahs. Ce sera un Iran qui cherchera de nouvelles relations avec les pays frères de la région. Comme je l’ai déjà dit, ce régime doit utiliser les ressources de l’Iran en dehors de ses frontières pour sa politique de bellicisme. Les responsables du régime, dont Khamenei, ont déclaré à plusieurs reprises que tant que leurs forces mèneront des batailles à Damas et dans quatre autres pays arabes de la région, elles n’auront pas à mener de bataille à Téhéran, Ispahan et dans d’autres villes iraniennes. La stratégie de survie du régime consiste donc à exporter le bellicisme et le terrorisme dans toute la région. L’argent qui appartient au peuple iranien est dilapidé pour faire avancer ce genre d’actions. Malheureusement, le reste de l’argent finit dans les poches et les comptes bancaires des mollahs dans divers pays. La part du peuple iranien est négligeable, et donc la pauvreté et la faim sont devenues des crises dans ces circonstances économiques.
Question : Mme Radjavi, merci beaucoup pour cet entretien. Je vous en remercie.
Réponse : C’est moi qui vous remercie. Merci à vous et à tous vos téléspectateurs.
Sur l’islam :
Si vous avez un peu plus de temps, je voudrais profiter de cette occasion pour faire quelques remarques sur l’islam. Vous savez que l’islam est exploité par le régime pour faire avancer son bellicisme dans la région et sa répression contre le peuple iranie. En fait, contrairement à ce que les mollahs avancent, l’islam est une religion de compassion, de libération et de paix ; c’est une religion de fraternité et elle promeut des valeurs humaines. Le monde doit savoir que les mollahs ne représentent ni le peuple iranien ni l’islam.
Ce que les mollahs font sous la bannière de la religion n’a absolument aucun rapport avec l’islam. Ils sont en fait les plus grands ennemis de l’islam. Les mollahs torturent et exécutent leurs opposants sous le couvert de l’islam. Ils répandent le terrorisme sous le couvert de l’islam. Ce régime, qui est le parrain de Daech, est responsable de la propagation de l’extrémisme au nom de l’islam dans toute la région. Ce régime pratique également la misogynie sous le nom de l’islam. Mais en réalité, tout le monde est égal dans l’islam et le seul critère est la piété.
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