Maryam Radjavi : le mouvement pour la justice continue jusqu’au procès des bourreaux
Discours de Maryam Radjavi à la conférence du mouvement pour la justice des victimes du massacre de 1988 en Iran
Je salue messieurs Ghozali, Garcès, Boumedra et Murphy, ainsi que le Père Brian et les avocats des Achrafiens qui demandent justice pour les Moudjahidine du peuple victimes de massacres.
Et je vous salue à vous, mes sœurs et frères, en particulier plus de 900 prisonniers politiques torturés par les dictatures du chah et des mollahs, dont beaucoup se trouvent ici.
Nous sommes à la veille du 31e anniversaire du martyre de 30.000 prisonniers politiques massacrés sur ordre de Khomeiny pour le crime d’avoir maintenu leur position et d’être restés fidèles au nom de Moudjahidine du peuple et à la cause de la liberté.
Adressons des milliers de saluts à ces jeunes âmes, à ces passionnés de la liberté et de la beauté, à ces reflets cristallins de l’espoir du peuple d’Iran.
Même mes amis oublient de me le rappeler
Mais je me souviens d’eux mille fois
Même si cent rivières coulent de mes yeux
Il faut se rappeler la rivière éternelle de ceux qui arrosent les jardins.
Un choc entre le Moyen-Age et la génération de demain
Les victimes du massacre sont la conscience insurgée de l’histoire de l’Iran. Des trésors de sincérité, de sacrifice et de fidélité que notre société recélait dans son cœur et d’où jaillit sa vie authentique.
Durant le massacre, dans une section de la prison d’Ahwaz, dans le sud-ouest de l’Iran, il y avait deux mollahs, Djazayeri et Abdollahi, qui hurlaient : « vous devez prendre position. Il y a d’un côté Khomeiny et de l’autre Massoud Radjavi. Vous êtes de quel côté ? »
Du fond de la salle une jeune fille a crié : « Vive Massoud ! A bas Khomeiny ! » Elle s’appelait Sakineh Delfi. Cette héroïne de 26 ans était originaire de la ville d’Abadan. En l’entendant crier, les pasdaran se sont jetés sur elle et l’ont gravement blessée. Le lendemain, sur les 350 personnes de cette section, 349 ont été pendues.
C’est de cette manière qu’a été taillé le joyau de la sincérité et du sacrifice, que son prix a été payé pour devenir le capital de la cause de la liberté et de l’avenir du peuple d’Iran.
Alors reprenons à nouveau le chant que Mahmoud Hassani, originaire de Chahroud, chantait avec 60 autres Moudjahidine en traversant le couloir de la mort de la prison d’Evine : « quand la nuit venue, tu vois une étoile filante dans le ciel, souviens-toi des flammes vivantes qui dans les nuits glaciales d’Evine se sont éteintes, pour qu’à l’aube, une étoile puisse s’allumer. »
Le massacre des Moudjahidine du peuple et d’autres combattants prisonniers politiques a été le choc sanglant entre le Moyen-Age et la génération de demain. La génération insurgée de la révolution de février, forte de la détermination d’une société libre et égale, et qui s’est retrouvée face au monstre de la tyrannie religieuse et sa vague de répression et de pillage. Le massacre de l’été 1988 est la scène effroyable de ce face-à-face historique. Mais ce n’en était pas la fin, car malgré toute sa douleur, c’était le début d’une tension qui continue et qui mènera la société à la liberté.
De ce point de vue, le massacre de 1988 est lié à la liberté et l’avenir de l’Iran, aux les droits de l’homme lapidés de l’Iran, à la résistance pour la liberté et l’égalité, à la trahison des étrangers partisans de la complaisance, à la peur et la honte de ceux qui en Iran prônent la soumission et bien entendu au renversement du régime. Parce que le jour où les mollahs, sous la pression du mouvement pour la justice du peuple iranien, seront contraints d’ouvrir le dossier de ce grand crime, ce sera la fin de la dictature religieuse.
Nous avons entendu et lu à maintes reprises dans les témoignages que face aux bourreaux, ces prisonniers politiques héroïques résistaient et saluaient le nom de Massoud Radjavi. Ils chuchotaient avec leurs codétenus les phrases apprises par cœur de ses discours. Dans les parloirs, ils se débrouillaient pour avoir des nouvelles de lui. En répétant ce nom le plus brûlant de notre époque, ils avaient un message. Leur message était le suivant : vous les générations qui viendrez après nous, vous les jeunes qui entendrez notre histoire inachevée, faite avancer la voie et la cause de Massoud. La voie de la lutte pour une société libérée de l’oppression, libérée de la répression et de la tyrannie, libérée de l’ignorance et de l’imposture. Une cause qui prend tout son sens avec le mot sacré de liberté.
Khomeiny voulait éradiquer l’OMPI
Vous savez que le but suprême du massacre de 1988, comme l’avait écrit Khomeiny dans son décret, était d’éradiquer totalement l’OMPI. C’est pour cela qu’il a mis en marche sa machine à tuer dans plusieurs domaines:
La vague la plus intense du massacre a commencé dans les prisons d’Evine à Téhéran et de Gohardacht à Karadj et visaient spécialement les membres de l’OMPI. Montazeri, le dauphin déchu de Khomeiny, a qualifié la tuerie dans ces deux prisons de « boucherie qui ne s’est déroulée nulle part ailleurs dans le monde ».
Le 25 aout 1988, le président du Conseil national de la Résistance iranienne, Massoud Radjavi, dans un télégramme au Secrétaire général de l’ONU Javier Perez de Cuellar, révélait que « pour les seules journées des 14, 15 et 16 aout, 860 corps de prisonniers politiques exécutés ont été transportés de la prison d’Evine au cimetière de Behecht-Zahra de Téhéran. »
Une autre partie importante du massacre a été la tuerie à grande échelle dans les prisons centrales des provinces qui s’est déroulée selon le deuxième décret de Khomeiny. Khomeiny y disait que les juges du régime ne devaient pas perdre de temps en envoyant les dossiers dans les centres judiciaires des provinces, et qu’ils devaient exécuter les Moudjahidine du peuple dans n’importe quelle prison où ils se trouvaient.
Dans la liste la plus récente des victimes du massacre que l’OMPI a rassemblée, figurent les noms de 110 villes de province où ont été menées ces exécutions.
Dans l’exposition installée ici, qui montre la bataille du peuple iranien contre la tyrannie religieuse, il y a une scène impressionnante avec des cartes séparées de chacune des provinces iraniennes montrant chacune sans exception d’innombrables enfants du peuple iranien exécutés dans le massacre de 1988 ou dans les exécutions des années 1980 et après. C’est-à-dire que le peuple iranien, de toutes les origines ethniques et religieuses, des villes et des provinces a payé le prix le plus élevé pour le renversement du régime et l’instauration de la liberté. Il était uni et solidaire et l’est toujours. Ce n’est pas un hasard si ce sont exactement ces villes et ces provinces qui se révoltent continuellement et où grondent les mouvements de protestation et où les villes se soulèvent les unes après les autres.
Notre société est faite de ce feu qui ne laisse pas de place à Khamenei et qui promet le renversement de ce régime.
Arrestation et exécution des prisonniers libérés
Un autre fait important parallèle à ce massacre, et à l’extérieur des prisons, ce sont les arrestations massives des prisonniers préalablement remis en liberté et des sympathisants de l’OMPI pour ensuite les exécuter en prison.
Au cours du mois du déclenchement du massacre, le président du CNRI a envoyé un télégramme au Secrétaire général de l’ONU pour lui dire qu’en même temps que les exécutions collectives des prisonniers politiques, « une vague de grande ampleur d’arrestations politiques a commencé dans diverses villes d’Iran touchant plus de 10.000 personnes ».
Après ceci, le Pr Kazem Radjavi, grand martyr des droits humains de l’Iran, qui était à l’époque le représentant du CNRI à la session officielle à la commission d’enquête de l’ONU sur les disparitions politiques au Palais des Nations à Genève, avait affirmé dans son discours : « en réaction à la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, le régime de Khomeiny a déversé toute sa haine sur les sympathisants de la Résistance dans le pays. De manière à ce que depuis l’annonce du cessez-le-feu (dans la guerre Iran-Irak) jusqu’à présent, chaque jour des centaines de personnes dans diverses villes d’Iran sont enlevées et envoyées en secret devant le peloton d’exécution ou jetées en prison. »
Une autre partie encore de ce massacre, a été les procès minutes des sympathisants de l’OMPI dans l’ouest de l’Iran.
Le 24 juillet 1988, Khomeiny a donné l’ordre secret de mettre sur pied un tribunal de campagne sous le nom de « tribunal d’examen des violations de guerre » et a nommé à sa tête le mollah Ali Razini. Le texte complet de cet ordre a été publié par la Résistance trois mois plus tard.
Mais le tribunal dans les jours qui ont suivi a changé rapidement d’orientation et au lieu des violations dans la guerre Iran-Irak, a visé les partisans de l’OMPI dans l’ouest du pays. La population de l’ouest de l’Iran s’était soulevée en soutien à l’OMPI et des jeunes des autres provinces étaient allés dans l’ouest dans cet objectif.
Le 17 aout 1988, le président du CNRI a envoyé au Secrétaire général de l’ONU et aux dirigeants des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, un télégramme sur les exécutions massives de gens qui n’avaient pas participé aux opérations de l’Armée de libération nationale iranienne et qui étaient uniquement exécutés pour leur soutien à l’OMPI.
L’impunité octroyée par la politique de complaisance
Le but, en évoquant ces événements, est de rappeler que les premières semaines après le début du massacre, la Résistance iranienne a lancé des activités sur la scène internationale pour dénoncer ces crimes et faire réagir le monde, en particulier les gouvernements occidentaux. Mais en raison de la politique de complaisance qui venait de faire ses premiers pas, ils ont gardé le silence.
En vérité, une des conséquences les plus destructrices de la politique de complaisance a été d’octroyer l’impunité aux bourreaux au pouvoir, ce qui a commencé au début des années 1980, a connu son apogée lors du massacre et continue encore.
Cette impunité accordée aux dirigeants du régime des mollahs, leur a permis, tout comme ils avaient commis le massacre des prisonniers et des personnes arrêtées en suivant un plan ordonné, de dissimuler également ce crime selon un plan contrôlé. Vous savez que depuis 1988, le régime n’a cessé de prendre des mesures pour faire disparaitre les fosses communes des victimes du massacre dans tout l’Iran.
Notamment en construisant des bâtiments ou des routes sur ces fosses communes, en transformant le terrain à coups de bulldozer, en construisant de nouveaux cimetières par-dessus, en arrêtant et torturant les familles qui recherchaient les tombes de leurs chers disparus. Une partie importante de ces informations, voire même des photos de ces destructions ont été publiées. Mais la communauté internationale en général s’est contentée de regarder en silence.
Le régime en place évite de publier des informations et des détails sur le massacre des prisonniers politiques, et refuse de rendre des comptes sur la scène internationale. Il refuse de donner la moindre information sur les tombes des exécutés à leurs familles, il détruit les fosses communes, mais nul ne lui demande des comptes.
Les plus hauts responsables de ce massacre et les membres des commissions de la mort occupent les plus hautes fonctions du pouvoir. Du chef de l’appareil judiciaire au président de la cour suprême en passant par ministre de la soi-disant Justice, tous les trois jouissent de l’impunité.
Une partie d’entre eux, notamment Khamenei, prennent la défense du massacre de 1988 et vont jusqu’à dire qu’ils en sont fiers. Et ils continuent de jouir de l’impunité.
De telle manière qu’Amnesty international, dans son rapport de décembre dernier a déclaré que « l’Iran est confronté à une crise d’impunité » et « la poursuite des crimes en Iran est liée directement à l’impunité dont jouissent les dirigeants du régime iranien ».
C’est cette impunité et ces yeux fermés sur les massacres qui ont encouragé le régime à exporter son terrorisme et sa belligérance.
Mettre fin à trente années d’impunité
Il est temps que la communauté internationale mette fin à trente années d’impunité des dirigeants du régime des mollahs.
Il est temps que le dossier des violations des droits humains en Iran, surtout les exécutions des années 1980 et le massacre de 1988, soit renvoyé devant le Conseil de sécurité de l’ONU.
Il est temps que Khamenei et les autres dirigeants du régime comparaissent en justice pour leurs crimes contre l’humanité.
Il est temps que l’ONU forme une commission internationale pour mener une enquête sur ce massacre.
Et le temps est venu pour que le monde reconnaisse le droit du peuple iranien à résister pour renverser le fascisme religieux.
J’appelle la communauté internationale, le Conseil de sécurité de l’ONU et ses Etat membres, le Conseil des droits de l’homme et les divers organes concernés de l’ONU, ainsi que l’Union européenne, les défenseurs des droits humains et ceux qui demandent la justice dans le monde de se dresser pour mettre fin à l’impunité des responsables de ce massacre.
Comment le monde peut-il supporter de s’asseoir à côté de gens à l’ONU et de négocier avec eux alors qu’ils ont les mains souillées du sang de dizaines de milliers de prisonniers politiques ? C’est une insulte aux droits humains. C’est ouvrir la voie à l’extrémisme et à l’intégrisme. C’est mettre en danger la justice et la démocratie, non seulement en Iran, mais aussi dans toute la région et dans le monde.
Ce massacre des prisonniers politiques en Iran est le plus grand massacre de prisonniers politiques de l’après seconde guerre mondiale.
Le mouvement pour la justice, un mouvement d’opprimés
J’appelle l’ensemble des Iraniens en Iran et à l’étranger à apporter leur aide pour faire progresser et se développer le mouvement pour la justice en faveur des victimes du massacre de 1988, autant qu’ils le peuvent et sous la forme qu’ils peuvent. C’est le mouvement des innocents. C’est le mouvement des opprimés. C’est le mouvement des endeuillés. Toutes celles et tous ceux qui dans ce régime ont connu la prison et ont reçu le fouet, et toute femme qui a été menacée et humiliée, sont membres de ce mouvement. Quiconque sent sa conscience bouleversée par tous ces crimes est membre de ce mouvement.
Un jour, face au bellicisme de Khomeiny nous avons dressé le drapeau de la paix et nous avons tenu bon si longtemps que grâce aux opérations de l’Armée de libération nationale iranienne, nous avons fait avaler à Khomeiny la coupe de poison du cessez-le-feu.
Un jour, nous nous sommes dressés contre le programme funeste de la fabrication de la bombe atomique et nous avons tant persévéré que nous avons fait avaler la coupe de poison de l’accord nucléaire à Khamenei.
Et à présent nous avons juré de persévérer sur l’appel à la justice jusqu’à faire avaler la coupe de poison des droits humains et du dossier du massacre de 1988 à ce régime. Oui, un millier de coupes de poison au service d’un millier d’Achraf, de bastions de résistance, pour renverser les mollahs et instaurer la liberté.
Le mouvement pour la justice continue : nous continuons pour que soit révélée la totalité des informations sur ce grand crime, pour que soient révélées les tombes de l’ensemble de nos sœurs et frères, et jusqu’au jour où, un à un, les bourreaux au pouvoir seront trainés devant la justice, jusqu’au jour où ce régime de massacre du guide suprême sera renversé par le peuple iranien avec les unités de résistance et la grande armée de la liberté.
Saluons la mémoire des martyrs.
Je vous remercie.
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